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Indignés espagnols. Une mobilisation citoyenne hors des appareils politiques

Les rassemblements commémorant le premier anniversaire de cette mobilisation, que certains croyaient éteinte, ont fait carton plein (voir ici). 

Une des caractéristiques de ce mouvement est sa volonté de combiner, d'une part, des rassemblements massifs qui créent un impact politique et médiatique mobilisateur et, d'autre part, des assemblées que l'on peut qualifier, en risquant un pléonasme nécessaire pour en dégager le sens politique, de citoyennes "par en bas" où se structurent des débats ouverts : ce second temps "réflexif" et authentiquement délibératif permet qu'un nombre d'indignés certes nécessairement plus restreint que celui des grandes manifestations mais malgré tout relativement élevé, prenne en main la définition de l'orientation à suivre et l'approfondissement de ses revendications.

L'occupation des places, en particulier à Madrid et à Barcelone, devient autre chose et plus que de "simples" actes de présence politique sur le mode d'une foule plus portée par le mouvement que le portant et l'orientant : par le va-et-vient du travail en commissions et des débats en assemblées plénières, véritables "assemblées citoyennes" en acte, nombreux sont ceux qui ont l'impression de prendre leur destin en main. Ce refus de la délégation de pouvoir aux "politiques", qui n'exclut cependant pas que ceux-ci puissent exprimer leurs positions, pose un vrai défi au mouvement qui cherche à s'inscrire dans la durée sans s'institutionnaliser tout en évitant que des leaders antipartis ne s'autoproclament dirigeants "naturels" du mouvement. 

Préoccupation qui pourra paraître utopique, brouillonne et condamnée à échouer à ceux qui ne conçoivent la mobilisation citoyenne que sous le contrôle et à l'initiative des partis ainsi que dans le sillage d'un leader charismatique ! 

Un an après leur premier cycle d'actions massives, les Indignés espagnols ont montré qu'il fallait toujours compter sur eux en maintenant le cap d'une "démocratie maintenant" ("democracia ya") mais explorant encore la voie (les voies) lui permettant de se doter des moyens de défier efficacement le capitalisme dont tant Zapatero (PSOE) que Rajoy (PP) ont respectivement été et sont les défenseurs zélés ! 

Impuissante à endiguer la masse des manifestants rassemblés lors des grands jours d'indignation, la police et les instigateurs politiques de ses interventions comprennent l'urgence qu'il y a à empêcher la tenue de ces assemblées où tente d'émerger un discours de l'alternative porté par ce qui, d'une certaine façon, s'apparente à un embryon de direction large du mouvement. De fait c'est souvent à coup de matraques que les "mobilisés de l'indignation" sont délogés des places qu'ils occupent (cliquer ici)!

En attendant plus d'informations sur l'actuelle reprise du mouvement et son éventuelle poursuite, on lira avec intérêt cet article qui, l'an passé, faisait le point sur l'originalité politique du 15-M (Mouvement du 15 mai) : Un autre regard : les indignés espagnols vu de l’intérieur

Précision : on ne niera pas ici les spécificités proprement espagnoles de ce mouvement, spécificités en partie liées à la "démocratie au rabais" qu'a instituée une Transition de la dictature franquiste à l'actuelle monarchie parlementaire. On rappellera que cette Transition, exorcisant le danger de la rupture inscrit dans les grands mouvements de grève ouvrière et étudiante des années 60-70, a fait l'objet d'un pacte entre des secteurs du franquisme et l'opposition démocratique, essentiellement le PSOE et le PCE : ce consensus a été obtenu autour de la figure d'un Roi garant que l'on ne ferait pas, en échange du retour d'une démocratie sous pression militaire, le procès de la dictature, et par la soumission aux impératifs d'une modernisation capitaliste du pays sous l'égide de l'Europe. Les Indignés ont à voir avec ce bâclage démocratique et social. Mais ce que nous pointons dans leurs actions comme volonté de renouveler les procédures démocratiques a une portée qui dépasse ces spécificités ibériques et doit pouvoir aider à faire émerger de ce côté-ci des Pyrénées une indignation qui n'a pas encore su commencer à se structurer. A cause de champs politique et social structurés par une autre histoire ... "démocratique" mais pas nécessairement immunisés contre le printemps des peuples qui a commencé dans le monde arabe avant de se propager en Europe et aux Etats-Unis !

Antoine

Photo : barcelona.jpg


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