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Les candidats du NPA dans les 2e, 3e et 4e circonscriptions répondent à l'adresse de la CGT-INRA

  
La CGT-INRA s'adresse aux candidats aux législatives (extraits) 

Madame, Monsieur, 

Vous vous portez candidat aux prochaines élections législatives dans le département de l’Hérault. Comme vous le savez, un centre de recherche de l’INRA est situé à Montpellier et dans diverses communes de ce département. Dans ces laboratoires, les chercheurs, les ingénieurs, les techniciens et les administratifs travaillent sur des sujets importants pour l’agriculture et l’élevage de demain. Ce site a acquis une réputation internationale de premier plan. Mais la recherche agronomique, comme au reste l’ensemble des recherches publiques de ce pays, sort affaiblie de la politique de démantèlement qu’elle a subie notamment depuis le vote de la LOPRI en 2005, intégralement mise en œuvre au cours des cinq dernières années. (l'intégralité de cette adresse ainsi que des analyses et propositions de la CGT-INRA est en fin de page)

La réponse des candidats du NPA 34

A l’attention des camarades de la CGT-INRA

Nous, candidat-e-s du NPA dans l’Hérault (Martine Granier dans la 2e, Thomas
Balenghien dans la 3e et Valérie Cabanne dans la 4e) et leur comité de campagne, vous
remercions de votre courrier qui nous permet de préciser notre position sur un sujet qui
nous est cher, certain-e-s d’entre nous étant chercheurs ou enseignants chercheurs,
certains en agronomie et pour certains militants CGT.

Nous ne pouvons que souscrire à votre analyse, d’abord car elle replace la
déstructuration de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR) dans un contexte
plus large.

En effet, nous ne pourrons pas nous donner les moyens de changer de politique pour
l’ESR sans faire tomber l’obstacle de la dette publique et son corollaire : les politiques
d’austérité. Nous pensons que la dette publique est illégitime i) parce que le déficit
primaire vient d’une diminution des recettes fiscales de l’état, ii) parce que la dette
s’alourdit du paiement des intérêts, l’état s’étant obligé à emprunter aux banques
privées, lesquelles empruntent presque gratuitement à la BCE et iii) parce que la dette a
encore été aggravée par le transfert massif d’argent public pour soutenir les profits
privés mis à mal par la crise des « subprimes ». Nous militons activement dans les
Collectifs pour un audit citoyen de la dette publique de l’Hérault pour y défendre la
nécessité de répudier la dette et d’imposer un moratoire immédiat du paiement des
intérêts. A partir de là, il faudra nécessairement imposer une socialisation du système
bancaire dans un seul et unique pôle publique bancaire, débarrassé d’activité
spéculative et tourné vers l’investissement.

La déstructuration de l’ESR s’inscrit dans un vaste mouvement de destruction des
services publics
et de leur asservissement aux intérêts privés (privatisation réalisée de
la poste et rampante de la SNCF, ou destruction de l’hôpital). Dans l’ESR, il s’agit de la
mise en place du processus de Bologne, c'est-à-dire l’ « économie de la connaissance ».
Ainsi, l’« autonomie » des établissements (loi LRU) n’est qu’une mise en concurrence,
dans un cadre de restriction budgétaire. Elle conduit en réalité à la mise sous tutelle de
nombreux établissements qui n’arrivent plus à équilibrer leur budget. Cette mise en
concurrence est renforcée par le financement des projets scientifiques sur appel d’offre
et à court terme que vous dénoncez avec raison.

Tout est fait au prétexte de l’« excellence », qui se résume à apparaître dans les
classements internationaux de type Shanghai. L’attribution des financements dits
« d’excellence » (Equipex, Labex, Idex) dessine une carte universitaire élitiste qui
délaisse des régions entières (par exemple le Grand Ouest).

En fait, c’est bien une soumission du secteur aux intérêts privés qui s’opère :
financement des recherches ayant un débouché économique immédiat, généralisation
des filières professionnalisantes pour les étudiants, pilotage du secteur par le patronat
qui a fait son entrée massive dans les conseils d’administrations au détriment des élus
personnels et étudiants (comme à l’INSERM, où le pouvoir décisionnel est passé ces
dernières années des chercheurs, aux médecins, et maintenant aux groupes
pharmaceutiques).

L’emploi précaire explose (20 % du secteur ESR), pour les personnels administratifs et
techniques comme pour les « jeunes » chercheurs, qui enchaînent les CDD souvent bien
au-delà de 30 ans. Le nombre d’agents non statutaires continue d’augmenter dans un 
contexte où l’emploi devient la variable d’ajustement des budgets des universités et des
organismes de recherche.

La Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP) s’applique avec brutalité à l’INRA
comme dans d’autres EPST (CNRS, INSERM,…) ou EPIC comme au Cirad, à Montpellier.
En restructurant les services administratifs, en externalisant certains métiers, la RGPP
entraîne la perte d’emplois et dégrade les conditions de travail.

Notre programme d’urgence pour l’enseignement supérieur et la recherche que le NPA a
porté pendant la campagne présidentielle (http://poutou2012.org/Enseignement-Superieur-et-la) et qu’il porte en ce moment pour les législatives comporte entre autres :

- l’abrogation des contre-réformes (LRU et pacte pour la recherche, LMD, Contrat
Doctoral Unique et Masterisation) ; la dissolution des agences de mise en concurrence
(ANR et AERES) ; la sortie du processus de Bologne et de la stratégie de Lisbonne et la
construction d’un grand service public de l’enseignement supérieur et de la recherche,
sur tout le territoire, indépendant des intérêts du patronat et des marchés ;

- un plan de titularisation massif de tous les précaires dans la fonction publique ; dans
l’ESR, nous revendiquons l’intégration à la fonction publique des 50 000 agents non
statutaires et l’embauche de 100 000 personnels supplémentaires ; pas de salaire en
dessous de 1 700 euros net, augmentation de 300 euros pour toutes et tous ; une
véritable politique d’amélioration de leurs conditions de travail, d’hygiène et de
sécurité ;

- le financement récurent des équipes permettant de mettre en place une recherche dans
la durée ; suppression du crédit-impôt-recherche ; retrait de la RGPP et des « plans
d’action » qui la mette en place dans les organismes de recherche.

Nous sommes particulièrement sensibles à votre conception de la recherche en
agronomie qui rejoint nos préoccupations pour le développement d’une agriculture
respectueuse de l’environnement, favorisant les circuits courts de production et de
distribution, permettant la reconquête du territoire par des exploitations à taille
humaine et le redéveloppement des coopératives agricoles évitant notamment le
surendettement des agriculteurs.
Nous soutenons le moratoire sur les organismes
génétiquement modifiés dans la mesure où la quasi-totalité des OGM commercialisés
sont le fait des grands groupes « fidélisant » leur clientèle en les obligeant à utiliser leurs
insecticides et les enfermant dans le rachat perpétuel de leurs semences avec des
méthodes dignes de véritables mafias (contrats léonins, procès, intimidations…).

Enfin, nous sommes particulièrement heureux que la retraite à 60 ans après 37,5
annuités reste une de vos revendications. Nous sommes le seul parti politique, avec LO, à
continuer à la revendiquer.

Avec les candidat-e-s du NPA de l’Hérault comme députés, vous trouveriez des relais
obstinés de vos revendications. Nous vous disons à bientôt, dans la rue, lorsque nous
aurons à lutter contre les plans d’austérité qui s’annoncent.

Bien camaradement,

Les candidat-e-s du NPA dans l’Hérault

L'adresse de la CGT-INRA

Madame, Monsieur,
Vous vous portez candidat aux prochaines élections législatives  
dans le département de l’Hérault. Comme vous le savez, un centre de  
recherche de l’INRA est situé à Montpellier et dans diverses communes  
de ce département. Dans ces laboratoires, les chercheurs, les  
ingénieurs, les techniciens et les administratifs travaillent sur des  
sujets importants pour l’agriculture et l’élevage de demain. Ce site a  
acquis une réputation internationale de premier plan.
Mais la recherche agronomique, comme au reste l’ensemble des  
recherches publiques de ce pays, sort affaiblie de la politique de  
démantèlement qu’elle a subie notamment depuis le vote de la LOPRI en  
2005, intégralement mise en œuvre au cours des cinq dernières années.  
Depuis 2011, les effets de la RGPP se font directement sentir avec une  
réduction drastique des budgets de fonctionnement. Les chercheurs  
doivent tenter de trouver dans des agences extérieures les moyens de  
conduire leurs recherches. Quel temps perdu ! Quelle perte  
d’indépendance en termes d’expertise, de connaissances, de  
propositions techniques nouvelles !
Si les agents de l’INRA ont placé en tête le syndicat CGT lors des  
dernières élections au Comité Technique, c’est probablement que les  
mesures que nous préconisons leurs paraissent appropriées. Il y a donc  
une attente considérable de leur part vis-à-vis de la prochaine  
majorité législative.
Nous souhaitons vous adresser notre analyse et les revendications qui  
en découlent, que vous trouverez dans le document ci-joint. Nous  
lirons avec attention votre réponse, que nous nous engageons à porter  
à la connaissance des personnels.
Recevez, Madame, Monsieur l’expression de nos sincères salutations.
 
pour la CGT-INRA
                   Pascal Tillard
                 cgt@supagro.inra.fr
 
 Les analyses et propositions de la CGT-INRA
 
 


La CGT-INRA ne sépare pas sa stratégie de défense des intérêts individuels et
collectifs des travailleurs de la recherche agronomique de son adhésion aux principes
fondateurs du syndicalisme de combat qui unit les militants de la CGT et les intérêts de
tous les citoyens. Elle inscrit son combat dans le contexte économique et social
qu’affronte toute la population.

C’est pourquoi aussi la CGT-INRA sera spécialement attentive aux engagements des
candidats aux élections présidentielles et législatives pour défendre et reconquérir les
services publics en général, de la recherche agronomique en particulier. C’est en ce sens
qu’elle s’adresse aux candidats à la charge de Président de la République ainsi qu’aux
candidats aux élections législatives de 2012 et aux partis politiques.

Les dernières élections professionnelles de 2011 qui ont placé la CGT-INRA
comme premier syndicat de l’INRA, toutes catégories confondues, la confortent
dans son rôle de représentation des intérêts des salariés.

Les propositions qui suivent sont aussi légitimées par l’appui des chercheurs et
ingénieurs de toutes les disciplines scientifiques de l’INRA qui l’ont choisie pour les
représenter au Conseil Scientifique National où huit des neuf sièges réservés aux élus
du personnel sont occupés par des candidats se réclamant d'une profession de foi
soutenue par la CGT-INRA et intitulée "Pour un INRA pérenne, totalement public, libre, au
service de tous les citoyens" (1).
Où en est la recherche agronomique dans le contexte de la crise du capitalisme?

Une crise économique globale mine l’ensemble du système capitaliste. L’aspect financier inédit
de cette crise étant à la fois une conséquence de fractures liées au système lui-même et la cause
de son aggravation récente. Presque tous les secteurs y sont plongés, des pans entiers de
l’agriculture et des industries sont délocalisés. La dette publique contractée par les Etats sur les
marchés financiers, qui est l’un des aspects les plus significatifs du capitalisme contemporain, est
soudainement utilisée comme prétexte à des politiques d’austérité qui aggravent les
conséquences de la crise pour les couches sociales les plus modestes. Cette dette n’est due ni
par les salariés, ni par les chômeurs, ni par les agriculteurs, ni par les artisans de ce pays, mais
résulte de transferts de richesses produites dans le pays au profit des patrimoines des plus riches
et du capital, aux dépens du travail.

Ces politiques d’austérité vont approfondir la crise sociale, le chômage, la montée des
inégalités et la souffrance au travail ; la CGT-INRA exige l’annulation de toutes les mesures
contenues dans les récents plans d’austérité et souhaite des engagements des candidats à la
Présidence de la République et à la Députation à n’en mettre en œuvre aucun autre.

Dans ce contexte, aucun développement des services publics ni de l’emploi n’est possible sans
l’instauration par les Etats de la maîtrise du crédit, notamment grâce à la constitution d’un pôle
financier public sous contrôle des salariés au travers de la nationalisation de grandes
banques. La construction de la confiance dans la monnaie est elle-même un service public et non
le résultat de notes données par des agences au service des marchés.

Dans le secteur agricole même, les structures financières coopératives et mutualistes (Crédit
Agricole, Groupama…) ont été aspirées dans la spirale des objectifs des grandes sociétés
européennes cotées en bourse. L’Etat doit poser les règles d’un retour aux valeurs fondatrices de
coopération.

Pour surmonter des crises qui sont une des caractéristiques du système économique
capitaliste, la seule solution que nos dirigeants ont trouvée pour maintenir des taux de profit déjà
exorbitants est une fuite en avant dans la globalisation de l’exploitation des ressources naturelles
et leur marchandisation. Ce faisant, en plus de détériorer nos conditions de travail, ils menacent
directement les ressources naturelles et la capacité de nos sociétés à satisfaire les besoins
essentiels, en particulier de nourrir leurs populations. Pour eux, la recherche et les connaissances
agronomiques ne sont plus hélas que des armes dans la guerre économique entre grands
groupes. Les travailleurs intellectuels sont mis en concurrence pour les moyens et « évaluation »,
« valorisation », « compétitivité » et « brevetabilité » deviennent les maîtres mots de la recherche.

Ils subissent ainsi la taylorisation qui se répand dans la « nouvelle économie » sous couvert de
«démarche qualité», des progrès de la « gouvernance » utilisant abondamment les nouvelles
technologies de l’information. Or face aux crises écologiques (climat, biodiversité, ressources
naturelles, pollutions diverses), face à la nécessaire construction de la souveraineté alimentaire
des différents pays au service des populations les plus modestes, il est urgent de renforcer une
recherche publique indépendante capable d’éclairer les adaptations nécessaires de notre
agriculture et de notre environnement aux changements globaux. Les enjeux, auxquels une
recherche agronomique publique doit répondre, sont multiples ; la population, essentiellement
citadine, attend une alimentation de qualité et ne doit plus subir le marketing alimentaire dont le
seul but est la marge au profit des grands groupes, et l’INRA peut encore défricher des voies de
progrès dans la satisfaction de véritables besoins sociaux.
Sous la pression des Etats Membres, la politique de l’Union Européenne mise en œuvre par
une Commission largement soumise aux pressions des lobbies privés, notamment au travers de la
Politique Agricole Commune, a fortement diminué la population paysanne et liquidé la majorité des
exploitations agricoles depuis 50 ans, au profit des oligopoles agro-industriels et d’une fraction
réduite de très grandes exploitations qui poursuivent leur expansion territoriale et économique.
Aujourd’hui, beaucoup d’agriculteurs, notamment les éleveurs mais aussi des viticulteurs,
arboriculteurs, maraîchers, doutent de la survie de leur exploitation. Des efforts importants doivent
être faits pour diminuer les intrants dans notre agriculture et trouver des variétés ou des itinéraires
techniques adaptés au climat futur et ce pour l’ensemble des systèmes agricoles et forestiers.

Dans l’agroalimentaire, alors que ce secteur est stratégique pour la France les plans sociaux se
succèdent et la surexploitation provoque une forte hausse des maladies professionnelles, avec
une extension de la précarité. Les grands groupes s’octroient de plus en plus le droit d’orienter les
recherches à leur profit en conditionnant l’apport de crédits contractuels à leur participation aux
structures de programmation des recherches ; l'organisation des pôles de compétitivité et de
l’ANR (2) en est une illustration. Leur apport financier à ces partenariats systématiques est, de plus,
allégé par le Crédit Impôt Recherche qui contribue à saper les bases de l’essor de la recherche et
du développement dans les entreprises elles mêmes. Dans le même temps, les Petites et
Moyennes Entreprises, qui réalisent pourtant l’essentiel de la production de qualité et forment le
tissu économique du territoire sont écartées des produits de la recherche.

Le bilan n’est pas meilleur en ce qui concerne la gestion forestière dont la logique de rentabilité,
alliée à l’application de la RGPP (3), soumet les agents de l’Office National des Forêts à des
pressions de plus en plus fortes, avec des conséquences dramatiques. Cette gestion purement
comptable met aussi en péril la pérennité de la production de nos forêts alors même qu’elles sont
amenées dans le futur à jouer des rôles écologiques (biodiversité, cycle du carbone) et
économiques (bois de construction et chauffage) croissants.

La refonte de la Stratégie Nationale de Recherche et d’Innovation est l’une des composantes
de la crise ; la déstructuration de la recherche s’est considérablement amplifiée depuis 2005
alors même que les chercheurs s’étaient mobilisés en 2004 pour une extension des droits et des
statuts publics.

La mise en place de l’autonomie des universités (Loi d’Orientation et de Programmation de la
Recherche et de l’Innovation et Loi relative aux libertés et responsabilités des universités)

engendre une soumission accrue aux grands groupes industriels et aux pouvoirs locaux. Ce
démantèlement méthodique a relevé de deux démarches : une stagnation puis une baisse du
soutien aux organismes publics de recherche et une marchandisation à marche forcée de
l’enseignement supérieur et de la recherche. La RGPP, la loi sur l’autonomie des universités, la
création de l’ANR et de l’AERES (4) et le recours au Grand Emprunt ont renforcé une recherche
pilotée uniquement sur projet, augmenté la précarité des emplois et l’exploitation des personnels,
et accentué les inégalités d’accès aux moyens entre laboratoires et entre les travailleurs de la
recherche. Cette folle multiplication des structures de pilotage et de projets associée à la
prolifération des évaluations est, en soi, une aberration.

La diminution des moyens publics force les équipes et les chercheurs à rechercher à l’extérieur
les moyens de travail qui leur donnent la possibilité d’exister dans un monde où la compétition se
généralise au détriment de la coopération. Cette situation menace la nécessaire indépendance des
scientifiques dont l’expertise risque de plus en plus d’être mise en doute par les citoyens. La
course à la publication et la volonté d’avoir l’exclusivité sur les droits de propriété intellectuelle
isolent les uns des autres des secteurs entiers de la recherche agronomique publique.
Dans le domaine de la génétique végétale et animale, la politique de brevetage
systématique tourne le dos aux principes du service public et permet la privatisation des
connaissances.

Contre la marchandisation de la connaissance sous toutes ses formes, la CGT-INRA
exige l’inscription dans les lois sur la bioéthique l’interdiction en France de tout brevet sur
les gènes, les marqueurs et leurs fonctions naturelles
pour contrer leur appropriation par des
entreprises privées. La France doit promouvoir au niveau international, et en premier lieu en
Europe, ces mêmes interdits, et agir pour le retour à un strict respect de la différence entre
invention et découverte.

De même, la CGT-INRA exige le maintien du moratoire sur les cultures de plantes
transgéniques
tant que le système de protection des droits de l'obtenteur s'appuie sur des
brevets, que le partage des responsabilités liées à la production de ces plantes n'est pas clarifié et
que l’innocuité de chaque transgène pour l’Homme et son environnement n’est pas garantie par
des recherches publiques menées de manière totalement indépendante des groupes agro-
industriels.

Reconstruire le service public de la recherche agronomique pour le remettre au service de tous
les citoyens devra donc être la première priorité de toute politique nationale dans ce domaine :
refus de l’austérité, maintien de l’INRA comme organisme public national de recherche, contrôle
amélioré de ses orientations de recherche par les représentants des personnels, augmentation de
ses effectifs de personnels titulaires et renforcement de ses moyens financiers.


Les trois paragraphes suivants énoncent les mesures selon nous nécessaires pour redresser la
situation actuelle : nous attendons des candidats et des partis politiques des engagements fermes
et assortis de la définition des moyens pour les mettre en œuvre.

1. Le financement de la recherche publique


Largement présentée comme privilégiée par rapport à d’autres secteurs publics qui de fait ont
encore plus été soumis à des suppressions massives d’emplois et à des diminutions de leurs
moyens, la recherche publique en général, l’INRA en particulier, subit aujourd’hui les effets
dévastateurs de la RGPP. Elle s’y traduit par des fusions de centres de recherche, ainsi que des
fusions et des fermetures d’unités, des pertes de savoir-faire, la taylorisation toujours plus poussée
du travail, l’affaiblissement des liens avec les agriculteurs dans la diversité de leurs organisations
et l’éclatement des collectifs de recherche. La recherche agronomique publique, déjà touchée
dans le budget 2011, voit ses moyens encore plus réduits en 2012 avec la baisse généralisée de
la subvention d’Etat aux unités de recherche. En outre, les sources de financement de la
recherche et de l’enseignement supérieur ont été largement complexifiées depuis plus de dix ans.
Le financement par projet multiplie les pertes de temps de chercheurs pour élaborer, et évaluer les
projets de recherche, exacerbe la concurrence entre scientifiques et accroît l’inégalité de l’accès
aux moyens de fonctionnement. L’effort réel de recherche est de fait grevé de coûts de transaction
exorbitants. La qualité de la recherche et l’aboutissement des projets pâtissent de la précarité de
l’emploi des jeunes ingénieurs, techniciens, chercheurs et de la compétition perpétuelle entre les
personnels permanents.

Le financement sur contrat de recherche, par essence aléatoire, déstabilise globalement la
cohérence de nos recherches, il faut en finir car les moyens existent pour redynamiser les
organismes publics de recherche.
C’est pourquoi, nous exigeons :

• La suppression du Crédit Impôt Recherche (10 Milliards d’Euros en 2010) qui a prouvé
son inefficacité à développer la recherche et qui a été utilisé par les gouvernements précédents
pour accroître les profits des grands groupes privés industriels, en particulier agro-industriels.

• La redistribution des montants correspondants aux organismes publics de recherche.

• La suppression de l’ANR et des fondations qui pilotent l'enseignement supérieur et la
recherche (Fondation de Coopération Scientifique de Saclay, Fondation pour la Recherche sur la
Biodiversité,…).

• Le reversement des fonds ainsi récupérés aux organismes publics de recherche et aux
universités.

• La fin des projets de Grands Campus et leur remplacement par un développement des
infrastructures, notamment ferroviaires, pour améliorer les relations entre les centres de recherche
et universitaires déjà existants.

• La fin de la RGPP, outil de destruction massive des emplois et des services publics pour le
compte des marchés financiers et le retrait des nouvelles règles de mobilité des fonctionnaires.

• Des garanties sur la pérennité des EPST (5) comme éléments-clés du dispositif de la
recherche publique, et leur financement direct par le budget de l'État, après validation par la
représentation nationale ; ce mode de financement, le seul qui soit démocratique, assure
l’indépendance des unités de recherche.

• Une très forte réduction de la part de leurs financements contractuels par un
relèvement de la subvention d’Etat.

• Une dotation annuelle à hauteur d’au moins 20.000 euros par chercheur pour
permettre aux unités de recherche de fonctionner normalement.

• Le gouvernement devra mandater la Direction Générale de l’INRA pour qu’elle
abonde les crédits nécessaires à l’ouverture des nouveaux programmes de recherche via les
budgets qu’elle alloue aux départements de recherche.

• Il faut que la Direction Générale et ses homologues des autres organismes-membres
dissolvent « Agreenium » (6), et que toutes les missions qui lui ont été attribuées soient rendues à
ces organismes, et il faut en particulier réintégrer dans leur organisme d’origine tous les agents
mis à la disposition de ce consortium.

La CGT-INRA tient à préciser qu’elle est évidemment favorable à toutes les collaborations entre
les acteurs de la recherche dont la réussite dépend de l'appui que les directions des organismes
publics de recherche devraient accorder aux équipes. En effet les équipes sont les seules qui
soient en mesure de prendre en compte les besoins et les opportunités de synergies
interdisciplinaires, de les coordonner pour les transformer sur le terrain en progrès et en
connaissances partagées.
2. Évaluation collective

La CGT-INRA tient à rappeler que dès lors que le financement des unités de recherche est
public, il est légitime que ces unités rendent des comptes quant à l'utilisation des fonds qui leur
ont été attribués. Elle tient également à rappeler que le jugement par les pairs doit rester la norme,
avec l’objectif de consolider les collectifs de recherche, de les aider à définir leurs orientations et
non de les mettre en concurrence. L’esprit de compétition aujourd’hui prôné comme garant
de l’excellence est en réalité source de conflits et d’individualismes qui nuisent à la qualité
et l’efficacité d’une recherche publique indépendante.

En conséquence, nous exigeons :

• La suppression de l’AERES car elle a été créée pour trier les soi-disant « meilleurs » et
exacerber la concurrence entre les équipes, entre les laboratoires, entre les unités de recherche,
et parce que, en outre, elle n’est pas adaptée à analyser des structures complexes et diversifiées
comme celles de l’INRA, constituées de domaines expérimentaux, d’équipes mixtes au sein des
Universités et des Écoles, et de laboratoires indépendants sur des thématiques finalisées
originales.

• que la Direction Générale de l’INRA soit mandatée pour qu’elle abandonne la
procédure d'évaluation actuelle qui aboutira à court ou moyen terme à moduler la rémunération
des personnels et l'accès aux moyens de recherche, et qu’elle réforme sur le fond le
fonctionnement et la nature des structures qui jugent et conseillent des orientations scientifiques
de l’institut, à savoir les Commissions Scientifiques Spécialisées (chargées de l’évaluation
individuelle des chercheurs) et les conseils scientifiques de l'INRA que ce soit au niveau national,
des départements de recherche et des centres de recherche, dans le sens de la collégialité et
d’une représentation démocratique des personnels.

• L’annulation des textes qui ont permis à la Direction Générale d’attribuer la Prime
d’Excellence Scientifique à quelques chargés et directeurs de recherches, choisis sur la base de
la « performance », prime qui ne vise qu’à individualiser les rémunérations et à nier le caractère
essentiellement collectif des activités de recherche ; ce sont ces raisons qui ont conduit les agents
de l’INRA à la rejeter massivement et toutes les structures d’évaluation à refuser de l’arbitrer.

3. Le statut des travailleurs de la recherche, leurs conditions de travail et de
rémunération


Dans la droite ligne des actions passées de la CGT-INRA pour la défense du statut des
personnels, nous exigeons :

• L’affirmation du statut de fonctionnaire d’Etat comme règle pour toutes les catégories
de personnels, de l’agent technique au directeur de recherche : condition nécessaire essentielle et
principale de l’indépendance de la recherche publique,

• La résorption de la précarité de l’emploi dans le secteur public en général, et dans
celui de la recherche agronomique en particulier. La part de l'emploi précaire s'est
considérablement accrue dans les EPST depuis plus de 20 ans ; plus de 15% des Equivalents
Temps Plein Travaillés de l’INRA sont occupés par des salariés précaires (thésards, CDD,
stagiaires de "longue durée", main d'œuvre occasionnelle,...). Cette augmentation de la précarité
est due au financement par projets et à la régression du nombre de recrutements.
• Une loi de titularisation de tous les non-titulaires correspondant à des besoins
permanents, dans un processus qui, à l’inverse de celle actuellement débattue, inclurait la majeure
partie des non-titulaires dans un processus de titularisation et qui ne donnerait pas prétexte à des
dégraissages préventifs de la part des directions des organismes publics de recherche en
interdisant le renouvellement des contrats des agents précaires de manière à ce qu’ils ne puissent
faire valoir leurs droits d’ancienneté.

• L’assurance que cette loi limite drastiquement le recours aux non-titulaires ; les CDD
doivent être dédiés à des tâches saisonnières bien identifiées à l’INRA (récolte, vendange…) ou
temporaires (remplacement de congés maternité…) et à quelques emplois contractuels sur des
objectifs de courte durée et sur des métiers très spécifiques temporairement nécessaires à
l'avancée de la recherche.

• La revalorisation des rémunérations de toutes les catégories de personnels et leur
indexation sur l’inflation. A l’INRA, les rémunérations liées à la valeur de l’indice de la Fonction
publique sont trop faibles (voir tableau en annexe) ; en 15 ans, les agents ont perdu près d’un
quart de leur pouvoir d’achat !

• La fixation de la rémunération dans la Fonction Publique à 1.700 euros par mois au
minimum et la refonte de l’ensemble des carrières de cette même Fonction Publique.

• Que la Direction Générale de l’INRA soit mandatée pour qu’elle mette en œuvre un
plan de recrutement à la hauteur des enjeux de recherche, concernant donc toutes les catégories
sans exception, des Adjoints Techniques aux Chercheurs, et que le budget de l’INRA soit
augmenté en proportion.

• Que la Direction Générale de l’INRA soit mandatée pour mettre en place un plan
pluriannuel de transformation d'emplois, pour renforcer le rôle des Commissions Administratives
Paritaires pour tous les corps de fonctionnaires et pour étendre ce rôle à niveau égal aux agents
non-titulaires.

• La programmation pluriannuelle d’un recrutement massif de jeunes de moins de
trente ans dans tous les corps de la Fonction publique qui contribuera à promouvoir les agents
plus anciens

• Nous exigeons enfin l’annulation de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant
réforme des retraites contre laquelle la CGT-INRA s’est battue aux côtés des organisations
syndicales confédérales des salariés et le rétablissement du droit à la retraite à 60 ans dans les
conditions obtenues en 1982 à taux plein pour 37,5 annuités puisque la preuve a été faite que tout
report de l’âge de la retraite diminue le montant des pensions et renforce le concept de « retraite
par capitalisation ».

Conclusion : Pour une Loi d’orientation et de programmation pluriannuelle

Nous nous adressons à vous candidats à l’élection présidentielle, aux élections législatives,
députés sortants, responsables politiques : la tâche de reconstruction d’un grand service public de
la recherche agronomique est d’envergure mais nécessaire au regard des enjeux. Seul un
engagement fort de l'État au travers d’une nouvelle loi d'orientation et de programmation
pluriannuelle pour la recherche permettra de relever les défis actuels, en particulier dans le
domaine de l’agronomie et de l’agriculture.

Pour être nouvelle, la politique à mettre en œuvre, doit se traduire par des décisions concrètes,
fortes et symboliques comme celles développés ci-dessus : l’arrêt de la RGPP, et la suppression
de l’ANR, de l’AERES, du CIR et le transfert des fonds qui leur étaient consacrés à l’ensemble des
organismes publics de recherche au prorata de leurs effectifs.

Le débat national sur la recherche doit articuler l’indépendance des organismes publics de
recherche vis-à-vis des « groupes de pression » et l’engagement des élus dans la définition des
grandes priorités.

Si ces conditions sont réunies, la science restera au cœur des objectifs des organismes publics
de recherche qui ne seront plus uniquement mobilisés pour élaborer des solutions à court terme.

Les réponses aux questions d’aujourd’hui sont entre nos mains ; la recherche publique doit
continuer à travailler pour résoudre les problèmes de demain.

Notes

1 http://www.inra.cgt.fr/actions/conseil-scientifique/elections_csn_2010/ElecCSN2010_proffoi.pdf.

2 Agence Nationale de la Recherche
3 Révision Générale des Politiques Publiques
4 Agence d'Evaluation de la Recherche et de l'Enseignement Supérieur

5 Etablissements Publics à caractère Scientifique et Technologique
6 Etablissement Public de Coopération Scientifique regroupant l’INRA, le Cirad,
 AgroParisTech, Agrocampus Ouest, Montpellier SupAgro et l'Institut 
 National Polytechnique de Toulouse, créé en 2009.
 













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