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Région. Vous avez dit droit au logement ?

  
Languedoc-Roussillon. Je travaille mais j’habite sur le canapé d’une copine (PATRICIA GUIPPONI, Midi Libre 15/10/2012)

Elle a enfin sa chambre. Son “chez elle”. Après des mois de galère à transiter d’un appartement à un autre. Sur le canapé d’amis ou dans un lit de camp, ses effets personnels rassemblés dans un sac à dos.

 Fanny : "Les loyers étaient inaccessibles pour moi"

"J’ai même partagé un minuscule studio avec une personne que je ne connaissais pas, dans le même cas que moi. C’est très délicat", confie Fanny. Au sortir de ses études à Montpellier, la jeune diplômée ne trouve pas de travail. Enchaîne les emplois précaires, les salaires dérisoires : "Les loyers étaient inaccessibles pour moi."

Elle jongle avec les problèmes, la déprime, l’isolement. Un cercle vicieux. Fanny choisit alors de migrer sur Paris, où la crise du logement et le prix des loyers sont certes plus critiques qu’en Languedoc, mais où elle espère "trouver enfin un travail".

Pas de CDI, pas d'appartement...

Même scénario de colocations forcées. Jusqu’à ce qu’elle soit embauchée en CDI, puisse justifier d’un salaire plus décent pour partager un appartement avec d’autres personnes, cette fois en colocation consenties et avec une pièce rien que pour elle.

Selon la fondation Abbé-Pierre, 421 000 personnes sont hébergées par un tiers, faute de logement propre. Autant de particuliers partagent un espace, souvent réduit, avec autrui. "Ce phénomène s’amplifie. Or, donner des chiffres régionaux est difficile", explique Guy Marion, chargé de mission pour l’association en Languedoc-Roussillon.

Françoise : du mal à joindre les deux bouts

Il n’est pas évident de clamer sa détresse sociale. D’avouer que, malgré un travail régulier, on n’a pas de toit à soi. C’est ce que ressent Françoise, 59 ans, commerçante dans le Biterrois. "Je ne veux pas embêter mes enfants qui ont suffisamment de soucis. Quand je suis allée faire échelonner mes impôts, on m’a dit que beaucoup étaient dans ma situation."

Son chiffre d’affaires est à la baisse. Elle a du mal à joindre les deux bouts. "Je suis dans un divorce qui s’enlise, avec ce que cela suppose d’inconfort matériel." Prise à la gorge, Françoise va être contrainte de quitter le logement. "Je me demande si je ne vais pas dormir dans l’arrière-boutique, même si une amie m’a proposé de venir temporairement chez elle." La commerçante hésite. Peur de déranger.

Siham : "Les bailleurs disent que je n’ai pas assez de revenus." 

Siham, Gardoise d’origine, employée sur Montpellier, a dû accepter de vivre un temps sur le canapé d’une amie. Ses recherches d’appartement se sont révélées vaines.

"Les bailleurs disent que je n’ai pas assez de revenus." Pourtant, elle touche plus que le Smic. "Je me heurte toujours aux deux mois de caution à fournir. Je n’ai pas de capital disponible."

A 27 ans, elle aspire à son indépendance, à son “chez-soi”. Elle patiente, optimiste : "J’essaye d’économiser pour un futur appartement." Dans son entourage, on n’est pas mieux loti : "Je connais un couple, obligé de cohabiter avec un autre couple pour limiter les frais."

Marc opte pour la colocation forcée

Marc, 42 ans, papa de deux jeunes enfants, va sous peu cohabiter avec un autre père de famille. En instance de divorce comme lui. Fonctionnaire hospitalier, il ne peut, avec ses seuls revenus, pourvoir à l’hébergement de sa progéniture.

Son ex-épouse a gardé leur maison à Lunel-Viel "car ma participation à l’achat était moindre". Alors pour honorer la garde alternée de ses gamins, il a opté pour la colocation forcée. "Ma sœur m’a présenté Didier, dans ma situation. Quand il a ses enfants, je dors sur le canapé. Lui prend la chambre et les petits l’autre lit. Lorsque c’est mon tour, c’est lui qui dort sur le canapé." Pas terrible, mais mieux que rien. "On se serre les coudes", observe Marc.

Audrey : obligée de dormir dans sa voiture

Sans cette solidarité, Audrey n’aurait pas pu sortir la tête hors de l’eau. Revenus faibles depuis sa séparation, factures impayées, loyers en retard. Elle n’ose demander de l’aide à sa mère qui a "déjà fait beaucoup pour moi".

Sa déchéance est telle qu’elle a dû, durant deux mois, dormir dans sa voiture. Aller aux Restos du cœur. "Sans le canapé d’amis dans les P-O, puis un copain d’enfance que je n’avais pas revu depuis quinze ans, basé sur Agde, j’aurais sombré." Aujourd’hui, encore en souffrance, Audrey veut rendre la pareille. Aider. Même si ce n’est que pour offrir un paquet de pâtes, un conseil. Parce qu’elle sait d’où elle revient.


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