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Equateur. Réélection de Rafael Correa et envers de médaille d'une "révolution citoyenne"...


 Entretien avec Alberto Acosta, candidat de l’Unité Plurinationale des Gauches à l’élection présidentielle

Équateur : ’’révolution citoyenne’’, modèle extractiviste et gauches crititiques


13 février par Franck Gaudichaud (CADTM)

 

La « révolution citoyenne » en Équateur est l’un des symboles des expériences post-néolibérales sud-américaines et le gouvernement de Rafael Correa est souvent évoqué comme une référence par de nombreuses gauches européennes. 

Les prochaines élections présidentielles auront lieu dans ce pays le 17 février 2013 [le résultat des élections], dans une conjoncture politique où l’opposition conservatrice a été incapable de présenter une candidature unique et alors que le gouvernement conserve une très forte avance dans les enquêtes d’opinions, mais avec une baisse notable après 6 ans de pouvoir. Il y a deux ans, nous avions établit un premier bilan critique de l’expérience équatorienne au cours d’une conversation avec l’intellectuel et ex-président de l’Assemblée constituante, Alberto Acosta |1|. Ce dernier est désormais candidat à la présidence au nom de l’Unité Plurinationale des Gauches [Unidad Plurinacional de las Izquierdas], coalition qui regroupe une dizaine d’organisations allant du centre-gauche à la gauche radicale, dont Pachakutik (parti indigène considéré comme le bras politique de la Confédération des nationalités indigènes d’Équateur - CONAIE) et le Movimiento Popular Democrático, d’origine maoïste et possédant une implantation syndicale notable (en particulier dans le secteur de l’éducation). L’occasion pour ContreTemps de poursuivre la conversation et le débat fraternel que nous avions initiés et de comprendre les évolutions en cours au sein du champ politique équatorien.

Critiques de gauche à la « Révolution citoyenne »

F. Gaudichaud : Alberto, nous sommes au cœur d’un processus politique et électoral national en Équateur avec la tenue des élections présidentielles en février prochain. Tu as été une figure éminente de l’Alianza País [la coalition qui a porté Rafael Correa au pouvoir en 2007], ministre de l’Énergie et des Mines, président de l’Assemblée constituante, et tu prends maintenant la tête d’une candidature d’opposition de gauche au gouvernement du président Rafael Correa. Que s’est-il passé ? Comment expliquer cette situation et ta propre trajectoire personnelle ?

A. Acosta : Le gouvernement de Rafael Correa ressemble fort aujourd’hui à un mauvais conducteur de bus... un conducteur qui met son clignotant à gauche alors qu’en réalité il tourne à droite. Le gouvernement de Correa n’a maintenant plus rien d’un gouvernement de gauche, rien a fortiori d’un gouvernement révolutionnaire et moins encore d’un gouvernement « des citoyens ». C’est un gouvernement qui a perdu sa boussole en chemin et qui prétend maintenant détruire l’une des plus importantes conquêtes de notre histoire récente, la constitution de Montecristi, approuvée par la majorité du peuple équatorien en septembre 2008. Les violations de cette constitution par le gouvernement du président Correa sont multiples et je pourrai passer des heures à les exposer.

C’est le même président qui, il y a quatre ans, défendait cette constitution en la présentant comme « la meilleure du monde » et en affirmant qu’elle durerait « trois cents ans », qui déclare aujourd’hui qu’elle définit trop de droits, qu’elle est « hyperprotectrice » et qu’il faut donc la modifier. Ne dirait-on pas le discours que tiennent les gouvernements néolibéraux pour remettre en cause des lois contraignantes parce qu’elles garantissent les droits des citoyens et des consommateurs ? Correa s’est converti en un personnage qui ne veut plus défendre une constitution que lui même a contribué à élaborer et à approuver. Telle est l’évolution actuelle du gouvernement équatorien.

L'intégralité de l'entrevue 

Résultats des élections

Rafael Correa est réélu avec près de 57% des voix. Le candidat conservateur est arrivé en 2e position avec quelque 23% des voix. En 3e position, on trouve l'ancien militaire qui avait été soutenu par le puissant mouvement indien du pays et qui, une fois élu en 2003, s'était aligné sur les préconisations néolibérales du FMI avant d'être chassé par une mobilisation de rue en 2005. Alberto Acosta a, quant à lui, obtenu un peu plus de 3%.

 
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Rafael Correa change de cap


Jusqu’à présent, l’exploitation du pétrole en Amazonie équatorienne est restée relativement limitée, mais le résultat des prochaines élections présidentielles pourrait bientôt changer la donne.


Parmi les huit candidats en lice, l’actuel chef d’État, Rafael Correa, semble être le plus déterminé à exploiter les richesses pétrolières enfouies dans la jungle. Une situation pour le moins paradoxale, puisque son gouvernement est à l’origine du projet Yasuni, qui a permis d’éviter l’extraction d’hydrocarbures au sein du parc national du même nom.


Rafael Correa justifie ce revirement en expliquant que les toutes dernières technologies permettront de garantir le respect de l’environnement, et assure que ces richesses sont nécessaires au développement du pays.


À l’opposé, Alberto Acosta dénonce l’obsession « extractiviste » du président et estime que ces projets comportent des risques écologiques élevés. Ex-allié politique de Correa, Alberto Costa est issu d’une coalition représentant les populations autochtones et divers mouvements de gauche.


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Un exemple d'unilatéralisme analytique : le PG et l' Equateur

Le Parti de Gauche développe un soutien sans faille à la politique de Rafael Correa. On pourra lire dans le "kit militant" équatorien qu'il a édité, à l'occasion de cette présidentielle, comment ce parti fait l'impasse, dans son analyse du processus politique de ce pays, sur les limites, voire les graves carences, que pointe Alberto Acosta. Voilà qui doit interroger ce que le concept de "révolution citoyenne", que le NPA ne reprend pas à son compte (1), signifie là-bas et peut signifier ici.

(1) Ce concept est à analyser du point de vue du rapport entre les institutions et les mouvements populaires. Comme nous avons pu le vérifier en France à l'occasion du mouvement des retraites, il instaure, au PG, un primat de l'institutionnel (les assemblées élues dont on prétend qu'il suffit d'en "révolutionner" l'architecture) sur toute autre forme de représentation de la population. Les mouvements sociaux sont, en dernière instance, soumis à une délégation de pouvoir aux élus "révolutionnaires-citoyens" qui auront pour mission de relayer les revendications. Cette césure débouchant sur un autre primat, celui des élections sur la mobilisation et les luttes, ne se résorbe jamais, même par hypothèse, en faveur de l'idée qu'un puissant mouvement social pourrait faire émerger une autre représentation politique dont le NPA a esquissé des contours à débattre (contrôle et révocabilité des élus, salaires desdits élus indexés sur ceux d'un travailleur qualifié, limitation des mandats, etc.). En Equateur, comme d'ailleurs au Venezuela, le rôle des mouvements sociaux est borné par les structures politiques (assemblées mais aussi parti du pouvoir) qui cherchent à garder toujours l'ascendant sur ceux-ci dans une dialectique de mobilisation "avec les élus", "par les élus", dérivant en mobilisation "pour les élus", "pour le président" lesquels, bien entendu, incarnent univoquement l'intérêt du peuple. Circularité argumentative dont on n'est pas obligés de penser qu'elle est la quintessence d'une politique pour la rupture écosocialiste et d'une démocratie par et pour le peuple (pardon pour la redondance) !

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GOUVERNEMENTS « PROGRESSISTES » D’AMERIQUE LATINE : De l’indépendance, mais pas de socialisme

Par Virginia de la Siega

Révolution par les urnes ? Socialisme du XXIe siècle ? Il circule dans nos contrées beaucoup d’idées fausses et d’illusions sur les gouvernements dits de gauche ou progressistes en Amérique latine. Pour pouvoir se donner une politique, qui n’a nul besoin d’être sectaire et propagandiste, il faut d’abord essayer de comprendre la réalité.


Les patriotes qui ont arraché l’indépendance par rapport à l’Espagne rêvaient d’une « Grande patrie latino-américaine », mais il n’y a pas aujourd’hui une seule Amérique latine.

L'article sur le site national du NPA 

Franck Gaudichaud avait écrit en 2008 : De la « révolution citoyenne » à la transformation sociale radicale ?


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